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nicolas charlet

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About Me


Inquiétante vision d’une morte bien vivante. Tu glisses dans l’air d’un matin doré, tu te faufiles entre mes draps, tu effleures ma main, tu rafraîchis notre maison de cocagne. Tu es là.Rien ne sera plus pareil. J’entends les oiseaux voler dans le bleu, monter en flèche vers la lumière, crier quand il fait silence au sommet de la montagne. Là-haut, je ne distingue ni l’azur ni la neige, ni le chant ni le sang. Je te vois.Qu’atteignons-nous dans ces moments de grâce où l’on ne sait plus la limite entre une simple pulsation pulmonaire et le souffle, entre la lumière d’un grain de sable et le scintillement d’une étoile, entre l’oiseau et l’envol ? Instants éperdus de vertige, comment dire ce temps en dehors du temps où l’opacité de ma peau se fait porosité ? Pareille à l’écorce trempée de rosée du matin.La terre brûle encore du feu de vos regards, et déjà vous brûlez le ciel de vos larmes.Dieu est dans les larmes plus que dans les églises. Il s’écoule de mes yeux à ma bouche.Je traverse tous les jours ce jardin où tu flânais. Je pense à toi tous les jours. J’écoute ta voix, comme un lointain souvenir d’une vie intense. L’intensité en vie. Ce chant des larmes vient de loin. Tu n’es plus là et tu fais naître en moi le frisson sans mémoire de la présence.Je rêve souvent de m’endormir, cesser d’avoir peur de tomber.* * *Souvent je me promène la nuit dans les jardins d’ici, seul au milieu des ombres. Les allées sont peuplées de statues. Je flâne et me perds entre les tombes d’inconnus. Des hommes sans visage, des statues sans vie. La nuit, les pins parasols se détachent à l’encre de chine dans l’outremer. Qui se souviendra de nous au lever du soleil ? Ils ne voient même plus errer le fantôme de Berlioz, les mains de Debussy sur ce piano à l’abandon. Je partage ma solitude avec quelques absents et mes absences avec d’autres solitudes. Mes fantômes ont traversé le miroir d’Alice. Comme la flamme d’une chandelle, ils ont le souffle ardent de la vie naissante, ils battent ma poitrine et brûlent mes lèvres.* * *J’ai croisé une dame très âgée dans les jardins sur Rome. Elle avait traversé le siècle, seule entre les statues de grands hommes. Elle marchait, doucement, avec une canne à pommeau d’argent, décidée à vaincre la chaleur, la fatigue, la lassitude. J’ai pris son bras, nous avons fait le chemin ensemble. Elle était si triste…Quand l’air est venu à manquer dans les poumons de Robert, Edouard s’est muré dans le silence. Ensemble, ils avaient vécu leur premier oxygène, leur première blessure, leurs premières émotions. L’intensité de la rencontre, à des kilomètres lumière de la ressemblance, a dû traverser durant un demi-siècle l’espace informe de l’absence. Edouard portait des Borsalinos, des gants de cuir et des costumes rayés. Il vieillissait et toujours s’en allait fumer du bleu. Seul. Il regardait étrangement son ombre sur le trottoir. Dans l’œil des passants, il cherchait le bleu des yeux de son frère, craignant tous les jours de l’avoir oublié. Il est mort en 1974. Sa fille lui avait donné des jumeaux deux ans plus tôt. C’était mon grand-père.* * *A ton insu, j’ai filmé ton visage au bord des larmes. Son visage, dans la lumière dorée d’un matin à Rome. Elle tremblait et parlait peu. La mémoire est ce qui fait tenir le temps dans l’instant. Elle rassemble les fragments d’une même histoire, relie les lieux, les époques et les hommes, tisse le fil d’une toile offerte à tous les pinceaux. La mémoire est la matière du poète.* * *Le poète fragmente et rassemble à la fois. Il s’attache à exalter le presque rien où sommeille le monde.* * *Elle parlait de la circulation des larmes, d’un son qui cherche à apparaître à une lumière qui se donne à entendre. Il est des larmes qui se voient parce qu’elles ne peuvent plus s’entendre.Submergé par ses larmes, Mozart aurait interrompu une répétition du Requiem au moment du Lacrimosa. Quand l’âme fond en eau, le discours s’interrompt. Même la musique fait silence… L’eau de la grâce, comme dit Thérèse d’Avila, est une parole étouffée, un soupir qui brûle les yeux. François d’Assise serait devenu aveugle d’avoir trop pleuré. * * * Elle est venue dans ces jardins, il y a quelques années, comme cette dame très âgée qui marchait doucement avec une canne à pommeau d’argent.J’erre dans la fluence des corps et des substances, à la recherche de l’autre. Avec cette fièvre dévorante de voir, jusque dans les plis, jusque dans la doublure d’invisible, jusque dans l’abîme.* * *Ils me reviennent par vagues successives, ils moutonnent dans ma tête emportant des torrents de matière grise que remplace l’écume du vide. Ils ont embrasé leur vie et se sont tus. Ils ont liquidé l’inessentiel. L’éphémère n’a rien à voir avec la durée mais avec l’éclair : le jaillissement de lumière menacé de disparition.* * *Elle dansait le flamenco en frappant le sol de ses pieds nus, une main sur le ventre comme une belle gitane. Elle, une déchirure dans le ciel implacable. L’innommable, le rugissement de la beauté.J’avais tout juste sept ans, je l’ai aimée passionnément, le cœur battant au moindre de ses gestes. Je buvais ses paroles et m’enivrais de sa grâce.Tu dansais autour de nous avec l’indolence d’une femme-enfant et tes yeux brûlaient mes pupilles d’imprudent. Tu étais l’algue dans l’eau. Une fine pluie de printemps dans mes mains recueillie. Bel ange aux mains fines, jeune fille au bord de l’eau. Tu te tenais debout au milieu des cadavres, belle de toutes les illusions et des charmes que la vie t’avait donnés. Tu faisais l’amour sur le champ de bataille et, nous autres, nous mourrions de ne pas te posséder. Te retenir. Tu tournais autour de moi comme une chatte en chaleur. Debout sur la table, au-dessus de la feuille à noircir de rêves de papier, tu tournais autour de moi comme cette fille sortie d’un film de Fellini. Sensuelle dans ta robe de chiffon, tu tournais autour de moi. Et, jambes écartées, tu répandais l’encre sur le papier. * * *Ce soir, je tends l’oreille à la rivière où s’évanouissent mes souvenirs.Une petite fille est plongée dans le coma depuis trois jours.Le frottement du temps n’atteint pas le noyau du galet. Sous le bleu, la pupille est luisante.* * *Je suis près de toi, ma femme aux yeux rivière. Tu brilles quelque part dans l’ombre. Je te rejoins quand la maison aux volets fermés s’endort. Tu n’as plus besoin de poser ta main sur le sable pour y laisser ton empreinte. Hier, je te voyais dans ce hamac baigné de lumière orange. Nue dans le linceul de ta beauté. Tes petits cris de bonheur résonnent encore dans mes nuits de silence. Ma vie n’est faite que de feu. De tout le reste elle est défaite. Je n’y vois rien où tu n’es pas. Je vais où tu es. Mes pas dans la cendre suivent tes pas. Mon cœur, une eau douce. Ton reflet. Flotte.Au loin, les arbres carbonisés du massif des Maures bravent le ciel. Le feu a traversé la forêt comme un souffle. Juste un passage. Tu avais le don de traverser l’espace comme le font les oiseaux. Je t’observais disparaître. Quelque chose avait changé. Ce soir, je regarde les oiseaux qui passent dans notre ciel. Je vole un instant avec eux, avec toi.* * *Je t’ai cherchée partout.* * *Toi tu chantais comme on soulève un corps qui s’écroule. Ce chant de l’âme, la voix d’un ange allège le poids de la souffrance et la rend plus tragique encore. Tes larmes incandescentes ont incendié le ciel.Une petite fille a remué sa paupière gauche.* * *Je suis ce déserteur qui ne parvient pas à se défaire de l’amour. Je suis cet aveugle qui dans l’attente de ton retour scrute désespérément l’horizon. Je suis cet homme aux mains nues qui regarde, impuissant, l’eau couler entre ses doigts. Je suis l’oiseau blessé qui dans la boue s’essouffle à rejoindre le nid. Je suis la feuille qui se décroche de l’arbre dans la tempête, et la douleur de l’écorce arrachée, et cette bouche asséchée tendue vers une goutte d’eau. Je suis le cri sans voix de la mère qui voit s’éteindre l’enfant. Je suis tout cela et la lumière d’un matin doré, la fraîcheur d’une main dans la mienne. Je suis. Assez fou pour te chercher où tu n’es plus.* * *C’était une nuit d’été à Rome. Je lisais une lettre écrite à nos enfants. Il y avait du monde assis en rang sur des chaises et puis deux lampes Balthus à mes côtés, un cocktail bleu sur une table et du personnel en habit, beaucoup d’amis, quelques absents. À la fin, il faisait presque froid. Toi que personne ne voyait, tu éclairais la nuit de tes larmes…* * *Elle sentait l’air entre ses vêtements et son corps. La chaleur lui donnait le vertige. Elle gémissait sur le sol brûlant. À la limite de perdre connaissance. Elle devenait aérienne. Rien ne pesait, ni la fournaise ni le coton. L’élastique distendu laissait entrevoir le gouffre où je la rejoignais. Dans la lumière poudreuse du Midi, la morsure infuse son venin sur les peaux dénudées. Frémissante à mon contact, elle se tendait comme un arc. Elle allégeait l’air de son passage. Je la regardais sans parvenir à fixer son image. Elle portait l’eau, emportait avec elle la fraîcheur. Le geste suspendu de celle qui versait l’eau puis se tournait vers le lointain faisait basculer le monde. Le cours du temps interrompu, les lèvres remuent en silence, les mains bougent sans déplacer l’air. Le souffle se ralentit. L’éloignement évide toute chose ici présente. Lorsque l’eau venait à mes lèvres, j’étais l’eau au bord de mes lèvres. Je n’étais rien sinon le vide où flottait la jeune femme à la carafe de cristal. Hors d’atteinte, elle veillait à étancher ma soif. On ne peut la nommer. Elle est si fragile. Elle passe comme un souffle. Elle ne pèse rien mais soulève tout. La grâce.Une petite fille s’est remise à rire.* * *Les soirs de pleine lune, j’aperçois ton ombre blanche sur la mer et ta longue chevelure courant de tes épaules à tes reins. Jeune fille au bord de l’eau, tu passes ton chemin, sans un mot.* * *Je suis planté dans la douceur du soir. Enraciné au bleu diurne. Incapable de dire ce qui me traverse. Sinon ce vide où se brise toute parole. L’entends-tu mon cri enfoui dans ma gorge ? L’écume du temps délave mes yeux de marin. Je marche dans la blancheur du précipice.Je t’attendrai, comme ce chien de la gare de Shibuya. Il venait tous les soirs sur le quai retrouver son maître après sa journée de travail. Il venait encore tous les soirs, le chien fidèle, après la mort de son maître. Le soleil est mort.Qu’est-il devenu ce petit garçon à l’air grave, debout au milieu d’une route déserte, un couteau à la main ? À demi rêveur, comme s’il était au bord d’une piscine, il observait l’objet merveilleux. D’une toile à l’autre, le petit garçon était toujours là, dans le bleu surnaturel de Monory. Un bleu lacéré de blanc.Tes mains me manquent. Elles ouvraient l’air autour de toi. Elles caressaient les choses. Elles ne prenaient pas. Tes mains venaient dans mes mains se chauffer. Ce matin, le jardin est givré. Le châtaigner tend tristement ses bras vers le ciel. Tu vois, c’est un peu notre vie, la valse de la lumière et de la glace. Étrangement, je sens la chaleur de ta peau contre la mienne. Il fait froid.Où va la ligne plate d’un électrocardiogramme après décès ? Traverse-t-elle les océans jusqu’à l’horizon ?Elle creusait la terre et le ciel, à la recherche de ses morts, de ses propres traits.* * *Je me souviens de Léon Didier Weill, vieux clown aux allures de prince. Je me souviens de cette lettre de Londres où l’amour d’une enfant mouillait son beau visage de vieillard, ses yeux bleu Fragonard. Allongé sur son divan, il fumait des Boyards, mon ami aux allures de Prince.Une légère brume enveloppe le paysage de décembre. On le sent là, tout proche dans le lointain. D’où vient ce flux ininterrompu où je rejoins l’arbre et la sève ? Les vieux châtaigniers le savent, il fera beau demain.* * *Elle attendait un enfant. Sa main caressait déjà son ventre. Dans ce pays qui n’appartenait qu’à elle, on entrait dans le rêve et l’on n’en sortait pas.L’hiver s’installe. Je dois fendre du bois, le ranger au sec, faire du feu, éviter que la cheminée ne fume, remettre des bûches et, pour finir, donner un coup de balayette. J’aime ces rituels qui accompagnent l’hiver. Ils me renvoient à ma nature végétative. Je m’attache à ne plus penser, ne plus observer la misère où je m’épuise. J’accomplis ces gestes avec la concentration du petit écolier à son pupitre.Dans la lumière indécise d’une journée qui s’éteint, j’erre comme un vagabond. Je voudrais aller quelque part puis me reposer. Je voudrais aller au-devant de toi, sans me perdre. Je marche au hasard. Sans rien voir de l’horizon. Éternel étranger, je ressens aujourd’hui cruellement le vide, celui de ma vie.* * *Les poissons rouges dansent devant moi. Ce matin, je vais les observer. Beckett n’espérait rien des hommes, Cioran préférait la compagnie des chats.* * *Tu vivais de l’autre côté, si loin de tout, si proche en réalité. Les voix autour de toi résonnaient comme des cris d’enfants. Tu brûlais au milieu du monde. L’incendie dans tes yeux trempés, personne ne le voyait, et tu voyais comme personne le monde tourner. Tu veillais le monde. Tu ne t’impatientais pas, tu attendais, comme la servante son Seigneur, dans l’ombre et le silence, en vérité dans la lumière de Dieu.Je voudrais qu’elle meure dans mon cœur. Ne plus l’attendre. Ma quête est dérisoire. J’en connais déjà la fin.* * *Je n’ai pas supporté que l’enfant pleure son doudou. Je l’ai cherché partout, à pied, en voiture, à quatre pattes sous les lits. Je l’avais vu si souvent serré contre la joue de l’enfant. Et je l’ai retrouvé, doudou perdu au bord d’une route déserte : il m’attendait sagement. Il avait passé la nuit dehors, certain qu’on viendrait le chercher au petit matin.Elle avait la légèreté, ce don de dire oui à l'instant. À dire vrai, elle ne disait rien, elle recevait. Son sourire où venait s’étendre le silence désarmait le grognement des chiens. Elle fondait en sourire. Comme si le sourire advenait visage. Elle implorait pitié. Se serrait dans un coin comme un petit animal épouvanté. Ils riaient à gorge pleine, les porcs aux visages d’homme. J’écris pour assécher ma soif, emplir mes poumons. Je suis le feu. Je suis la révolte. Aveugle. Je balaie l’espace de coups de canne, de coups de griffes. Bavant d’une faim inassouvie, je plante mes crocs dans le vide. Le fond de l’être. Une rivière d’or aux flots bleus, une eau fraîche comme cette flaque de lumière dans tes yeux.Avant de s’éteindre, Hamlet prononce Tout le reste est silence* * *C’est encore le matin. J’écris face à la fenêtre baignée d’azur, avec Le Bleu du ciel de Georges Bataille posé sur la table. Au mur, la photo d’une piscine où passe, nue, la femme aux yeux rivière. Mon regard glisse d’un bleu à l’autre. Il glisse sans vraiment voir. Je suis seul ce matin avec ce livre, le ciel et cette photo en face de moi.Je te cherche dans la chaleur de mes lèvres de papier. Je n’écris que pour toi. Je te regarde verser l’encre dans ma bouche, couler en larmes de feu, ouvrir ton corps si pur. De mon visage, tu savais le moindre trait, la moindre marque. Tu sillonnais dans les lignes de ma peau, traversant mon corps, ma tête, mon cerveau ; et toi seule, connaissais la saveur de ma langue, aigre-douce, mi-orange mi-amère. Je sens encore la fièvre battre tes narines. J’entends le petit cheval dans ta poitrine et le halètement de ta respiration. Je vois encore tes yeux perdus avant d’avoir donné.Je suis un aveugle à qui l’on parle de couleurs. Assis au bord de l’eau, je n’ai pas pêché aujourd’hui. J’ai regardé les poissons. Regardé ma vie couler.Mon amour, j’ai un peu vieilli et demain je serai vieux, mais, vois-tu, je resterai l’ami des oiseaux, le passeur, la poussière d’étoile. Cet homme ivre de ciel qui n’atteint la rive que pour s’en dessaisir. Un pêcheur de crevettes en aquarium. Où es-tu ? Je ne vois plus ton visage, je n’entends plus ta voix. Ton absence fait de moi un vagabond. Je t’appelle et tu ne réponds pas. Où es-tu ? J’ai peur que tu sois morte comme si l’amour fané avait pu t’emporter.La pensée obsédante de la mort paralyse mon corps. Je n’ai rien écrit de tout le jour. Je suis resté seul, l’œil rivé vers les montagnes derrière la fenêtre. Je ne sais plus être vivant.* * *Alice, victime d’une avalanche de maladies, vécut dans l’ombre de son frère Henry James. Écrasée par le poids des hommes et celui du génie, elle passa inaperçue, recluse dans son lit de femme malade. Son journal, découvert après sa mort, révèle une plume saisissante… Je crois que si je prends l’habitude d’écrire quelques mots sur ce qui se passe, ou plutôt sur ce qui ne se passe pas, je perdrai peut-être un peu ce sentiment de solitude et d’isolement qui m’habite […] Gribouiller mes notes et lire la densité et façonner la masse informe au-dedans. La vie semble d’une inconcevable richesse.Pris dans une course folle, identique à celle du microsillon qui tourne sans avancer, mon esprit romantique se déploie en un mouvement statique. Il est un certain lyrisme du silence qui ne supporte ni gesticulation ni bavardage. La course immobile a l’avantage de ne pas fatiguer.Valeureux chevalier d’une cause imaginaire, Don Quichotte erre d’aventure en aventure, inconscient de la solitude où il se trouve. Dans son absurdité magnifique, sa quête est tragique. Lui ne voit pas ce que nous voyons. Touché par la grâce de l’illusion, il est ce crucifié de l’inutile, le héros des causes perdues, le doux malade des chevauchées statiques.De temps à autre, les mots s’échappent en flopées de bulles de savon. Je ne les retiens pas, elles éclatent à l’air libre et font rire les enfants.Il pleut. Il pleut depuis des jours. Il pleut sans cesser de pleuvoir. Comme si mes larmes retenues pleuraient au dehors. Si l’on rassemblait les larmes versées depuis la nuit des temps, d’immenses vagues se formeraient sur la Terre.Malgré lui, le dandy aime follement la vie. Il l’a délaisse comme on abandonne une amante trop brûlante. L’aveu de sa pauvreté le rend humain en dépit du masque qu’il porte, comme on porte sa croix. Que reste-t-il quand on a tout brûlé ? Un petit tas de cendre ?Derrière les carreaux, je te vois disparaître dans l’eau.Seul dans la maison aux volets délavés, toutes fenêtres ouvertes. Je pense à la mer, de l’autre côté de la montagne. La mer est inhumaine. Éternelle agonie, elle va et vient comme une respiration obstinée. Quand la mer se retire, revient la lassitude. Il pleut depuis des jours. Derrière les carreaux mouillés, la pluie efface le vert, efface l’horizon. Promenade nocturne en compagnie d’un rossignol. L’errance dans les étoiles calme le feu en moi, me console. Elle me rend à mon enfance. Ma mélancolie se souvient de mes éclats de rire.Je voudrais me baigner avec toi dans le bleu.Texte publié aux éditions nuit myrtide, en décembre 2007 sous le titre Je t'ai cherchée partout.