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L'eau est tellement froide que seul un batracien à pu y entrer. La nuit, ses homologues l'accompagnent dans un chant de louange qui berce et agace ceux dont l'heure n'est ni à l'art ni à la diplomatie. D'ailleurs, bon nombre de ceux qui se tournent et se retournent dans la nuit n'imaginent pas combien le concert va durer, et avec lui la lente entrée dans des songes tant attendus va être perturbée par les sautillements réguliers et les vocalises profondes des animaux luisants attirés par la fraîcheur de l'eau claire.
Il n'y a rien en dehors de cela. L'esprit tourne et retourne des images déjà vues et des situations potentiellement futures. La bestiole tournera sans cesse dans sa mare, sans pouvoir en sortir ; on la trouvera le ventre tendu vers le ciel si rien ne se passe. Le brin d'humanité qu'il reste alors en nous nous encouragera peut être à sortir la pauvre bête de sa flaque piégée, la déposer sur le bord et discuter un instant de la pluie ou du beau temps.
Nous reverrons peut être la même bestiole entêtée tourner dans la même flaque le lendemain. Et sans prendre garde on se lassera de sa présence, ne l'écoutant plus, ni elle ni ses congénères, on se tournera définitivement en pensant à autre chose, à nous mêmes, aux autres, à rien, enfin. Les bestioles de son espèce sauteront inlassablement vers cette flaque ou vers une autre de toutes façons, on en mangera les cuisses lors d'une fête prochaine.
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