Le film n'est ni plus ni moins que le reportage, tourné en noir et blanc par souci d'économie. Nous découvrirons peu à peu Ben, ses pensées, ses méthodes de travail, ses amis et nous deviendrons très vite, à l'instar de l'équipe de télévision, ses complices.
Film culte pour les adolescents belges des années 1990, C'est arrivé près de chez vous met en scène une petite équipe de journalistes qui tournent un reportage sur Ben, un homme qui a la particularité de tuer pour gagner sa vie.
Il s'attaque principalement aux personnes de classe moyenne et aux personnes âgées histoire, dit-il, de « travailler petit mais que ça rapporte beaucoup ».
Ce film se veut une parodie cynique de la célèbre émission Strip tease (documentaires belges d'un genre nouveau dans lesquels les journalistes s'effacent pour laisser parler les protagonistes seuls et les mettre à nus).
Le film se veut d’un humour très noir, choquant par sa violence mais contrebalancé par un ton exagérément sérieux rendant le tout burlesque.
Ce faux documentaire, bien trop gros pour qu’il puisse paraître vrai, est dirigé par Rémy (interprété par Rémy Belvaux) qui interroge Ben (Benoît Poelvoorde) sur sa « vie professionnelle ». Mais bien souvent, Rémy se contente d'écouter les monologues de celui-ci. Au fil de l'histoire, Rémy devient son ami et ensuite son complice. L'équipe est aussi composée d'un caméraman et d'un preneur de son qui sont assassinés pendant le reportage lors de fusillades entre Ben et des ennemis du milieu
Ben assassine comme d’autres vont à l’usine : tuer, c'est son métier. Il l'éxécute sans plaisir, sans remord non plus. Commettre un assassinat n'est pas une chose importante à ses yeux. Par exemple, il se plaint des fraudes des chefs de chantiers juste après avoir assassiné un veilleur de nuit, ou encore il parle de cinéma (« Ca ne vous rappelle rien ? Le vieux fusil, Philippe Noiret… bon film ça ») après avoir assassiné un homme et sa femme.
Ben est aussi poète. Il improvise par exemple un poème sur les pigeons (« Pigeon, oiseau à la grise robe / Dans l'enfer des villes / A mon regard tu te dérobes / Tu es vraiment le plus agile ») en pleine fusillade ou un autre sur la mer du Nord au restaurant.
Il semble cultivé, principalement concernant l'art et le cinéma et a son mot à dire sur tout (« Qu'est-ce qui te choque quand tu regardes ces habitations sociales ? La première chose qui te saute aux yeux ? C'est les briques ! C'est les briques rouges ! Mais le rouge, c'est la couleur du sang, c'est la couleur des Indiens, c'est la couleur de la violence ! »).
« Avec la mer du Nord Le long des golfes clairs Et des vagues dodues Pour arrêter les vagues Et des poissons volants, volant comme des goélands. Et du plancton, en veux-tu, en voilà Et des saumons rouges surgissant de l'au-delà ! Et les méduses amères Et les algues pourpres Et les goëmons d'hiver Rien… non rien ne m'empêchera de citer ton nom Mer ! Mer ! cruelle marâtre amère et les eaux qui (…) »
la conception de l'affiche du film :Considéré à sa sortie comme une blague d'étudiants épris de violence et d'humour noir, le film devenu "culte" peut être vu rétrospectivement comme une double fable. D'un côté, il évoque dans ses dialogues le racisme latent, le conformisme et les idées reçues d'une société wallonne qui doute profondément d'elle-même ("on mange les moules à la mer", les Africains ont de "grosses proportions", etc...). De l'autre, il livre une profonde réflexion sur les médias et le traitement de l'information. Les personnes qui font le reportage sont de plus en plus impliquées dans l'action de celui qu'elles filment au point de devenir complices de ses meurtres et de son viol. La question posée par "C'est arrivé près de vous" est la suivante : Est-ce qu'il y a des journalistes parce qu'il se passe quelque chose ou est-ce qu'il se passe quelque chose parce qu'il y a des journalistes? L'invasion de la télé-réalité, encore embyonnaire au moment de la sortie du film, révèle aujourd'hui la portée prophétique de ce chef-d'oeuvre