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Le neutrino est l'enfant de la métamorphose. Lorsque un proton se transforme en neutron, dans le coeur ardent du Soleil, un neutrino s'échappe. 65 milliards de ces particules élémentaires, (de dimension nulle), traversent chaque centimètre carré de notre peau toute les secondes. Grand problème de l'astrophysique, personne ne connaît son utilité... Sa présence indéniable, sa captation par toutes les technologies modernes quasi impossible, c'est un voyageur du vide, une petite bête sans raison d'être, un peu comme je suis aujourd'hui présente au monde. Le neutrino cavale. Et personne ne l'avale.
C’est un voyage sans fin, une sorte d’infinie incompréhension d’incompressibles soi recherché au travers de toutes les routes possibles, au- delà de toutes les montagnes, par delà tous les soleils et plus loin encore que le bout de l’univers. Une quête sans autre aboutissement que la mort physique, après avoir laissé sur les chemins du doute toutes les peaux de l’âme, égrainées ci et là , éparpillées, perdues, lâchement abandonnées pour un horizon fuyant et infidèle en lequel je croyais. D’impossibles nuits noires sur ma peau blanche, les yeux ouverts comme dans le vide, les bras ballants sur les côtés du lit, le corps pétrifié par la peur de ne jamais trouver l’essence.
Je ne saurais jamais dire quand est venue la brisure, six centimètres derrière mon nez. Quand les jours ne se sont plus couchés. Quand demain est devenu hier, ni quand je suis tombée, de tout mon poids, dans le cercle douloureux des neutrinos sans avenir. Je voulais qu’ils soient fiers de moi. J’ai tout fait pour tout réussir. J’ai tout réussi. Et dès lors qu’il n’y a plus eu de challenge à relever, dès lors que l’étonnement a disparu, j’ai cru être oubliée. Je n’avais plus d’efforts à fournir, puisqu’ils n’étaient plus fiers, mais simplement… habitués, à ne jamais me voir échouer. Et puis, lancée aux loups comme un vulgaire sac de viande avariée, j’ai perdu la force et le courage de continuer à me battre. Parce que… pour qui ? Et puis. Pourquoi ? Mais dans quelle merde on est ? A qui je sers ? Mais non, ce ne sont pas des questions existentielles qui passent leur chemin sans attendre de réponses. Non je ne vais pas fermer les yeux, comme tant d’autres, cette vie ne servira pas à rien. S’il faut que j’en perde la lueur dans leurs yeux. S’il faut que j’en perde mon utilité publique. S’il faut que j’en perde chaque centimètre de mon corps. Je le ferais, j’irais, je courais jusqu’au bout de mon souffle, vers ces questions sans réponses.
Ce n’est ni dans leurs baisers, ni dans l’excitation chimique de deux corps (ou plus) qui s’attirent ou se repoussent, ni dans les drogues, ni dans le travail, ni dans la famille, ni dans le temps libre (si tant est qu’il le fut un jour), qu’il est possible de trouver la morphine nécessaire, comme palliatif à la lucidité sur un monde insensé. Ce ne sont ni les amis, ni les religions, ni les corps, fébriles, usés, vieillis, dont les bras sont trop courts pour embrasser toutes les peines, et les jambes trop lourdes pour courir après les brebis égarées par un berger endormi.
Car à peine a t-on l’audace de croire que ceci est une vérité et qu’on en gardera l’essenciel, qu’elle s’étale aussitôt comme un phénomène livré à un éphémère qui la dépasse elle-même, qu’elle trébuche, de tout son être, et plonge le nez dans la boue nauséabonde de l’humanité, pour ne jamais se relever intacte. La vérité n’est pas intègre. La vérité est un pollen. L’homme un organisme génétiquement modifié. La vie une sorte de poison pleine de saveur, pleine de lueurs noires, pleines de mensonges, pleines de morts-nés qu’on donne à manger aux nouveaux- nés, sans avoir pris le temps, ne serait-ce qu’un instant, de poser sur l’autel la gerbe des parents.
Et je suis là , aujourd’hui comme hier comme demain. Enveloppée d’une matière qu’on appelle un corps, d’une matière fragile et mortelle, d’un mécanisme complexe semblable aux mots-fléchés, d’une voix qui m’offre à vous. Un corps déambulant parmi tant d’autres. Un corps comme tant d’autres. Qui s’espère dans la différence. Qui se languit d’une délivrance. Qui se complait dans la méfiance. D’aucune différence nous ne sommes. La seule qui tient aujourd’hui comme vérité qui demain sera boueuse, est celle qui fait qu’aujourd’hui certains marchent droit, et que moi, saoule, comme une ivrogne sans son poignard, je ne vois pas de routes, je ne tiens pas sur le fil, et je flotte dans le vide, comme une bulle d’enfant qui s’amuse avec le vent, comme seul remède, comme intermède, à ce théâtre organisé qui n’a jamais de fin, comme seul repère à dire « tout se vaut, sans équivoque, alors…», et les routes se dessinent à l’infini, dans toutes les directions, sans aucun panneau, ni non plus de prison.