OPALINE

Je suis l’imaginaire idéalisé par les poètes, la muse virtuelle des artistes en décalage de temporalité. Princesse turquoise d’occident, mes accents de magie orientale dansent dans votre subconscient au rythme de mes percussions transcendantes et de mes charmes qui se miroitent dans le porphyre du désir broyé dans les flammes hologrammes. Perle d’érotisme, je suis aussi inaccessible que mon chant de sirène urbaine. Petite-fille d’une célèbre danseuse slave réfugiée en Suisse, je suis la femme fatale aux rêves de mes prétendants, poussière opaline de regrets. Pourtant j’existe bel et bien, je suis réelle d’atomes aux courbes de satin idéales. Je ne suis pas actrice de cinéma. Avec moi, vos existences se transposent au cinéma le temps d’effleurer le parfum de ma vie nomade. Durant les années nonante, je fus la muse des peintres, la cover-girl des photographes, l’égérie des poètes, l’inspiratrice des romanciers, la fascination des graphistes, la cicatrice ouverte des bardes. D'autres ont ont déposés leur hommages à mes pieds doux et caressants. Mon portrait stylisé occupa littéralement toute la ville de Genève durant l’été 1993 à travers l’affiche du Festival de la Bâtie. Peut-être aurais-je accepté de tourner avec Jean Eustache s’il ne s’était retiré du monde en 1981. Ou alors c’est moi qui suis arrivée sur Terre trop tard. Avec le nouveau millénaire, je me suis retirée de la vie publique, continuant à parcourir les continents. A 100 ans, je demeurerai la femme fatale intemporelle, la diva sans filmographie affranchie des modes et de la corruption qui fit de votre vie un délicieux cinémascope de quelques secondes si vous m’avez croisée uniquement sur la toile électronique, ou de quelques heures au fil des saisons si vous m’avez connue lorsque je vous offrais un peu de temps de ma jeunesse insolente et cristalline dans les jardins, les cafés et les alcôves des plus belles villes du monde.