Née fille pudique et indécente du ventre de ma mère...je suis tout puisque je ne suis rien. De divisée je suis devenue multiple, et je fouille, je gratte, je creuse, je soulève, inlassablement obsédée des mystères...
"L'amour de soi n'est pas un dû, mais une conquête, une lutte acharnée contre tout ce qui en soi veut rester petit. Je n'aime que mes victoires sur mes échecs. J'ai choisi d'être inachevé, je me suis condamné à mon recommencement à perpétuité. Et c'est comme cela que j'aime mon prochain, réveillé d'entre les morts, amants de ses surabondances, dresseur et redresseur de ses torts, civilisateur de sa bestialité, fondateur de soi, responsable, tellement rappelé à la vie qu'il étonne les vivants, ces cadavres pourrissants qui ne sont sensibles qu'aux appels de la mort." Eric Bénier-Bürckel ( Un peu d'abîme sur vos lèvres )
"Dans le vide de la pénombre, entre ciel et terre, se greffaient des chants d'oiseaux. Il y avait des ailes froissées, des frôlements mystérieux, des passages fugaces de fantômes minces et inconnus. C'était comme de la soie, dans le vide, entre ciel et terre. De la soie fragile qui se déchirait par endroits. L'eau s'en allait sous nos jambes. Elle claquait de la langue en passant. Elle portait en courant mille chansons venues d'ailleurs, mille chansons et mille larmes." Calaferte
"RENAISSANCE...
Un goéland s'élance du haut de la falaise avec une plainte d'enfant, un miaulement mou qui provoque un mouvement de panique sur la corniche accroupie dans les vagues. Des oiseaux s'envolent avec un claquement sec, avant de revenir, rassurés, en battant éperdument des ailes, s'abattant sur la falaise tous ensemble, comme un filet qu'on jette à l'eau.Porté par le ressac, je sens le corps de la mer, cette grosse masse vivante, ahurissante d'élasticité, se presser contre le mien, égrenant sa vie salée sur ma peau écorchée de bulles tièdes, épousant mes gestes dans un sincère élan d'amour.Je rame doucement des bras et des jambes, laissant l'eau ruisseler sur mon menton, crachant régulièrement les minces filets d'iode qui se cousent à mes lèvres tels des limaces translucides.La colère de l'eau, je la connais bien, ses caprices, ses mollesses, ses brusques changements d'humeur, je la reçois avec un large sourire complice."
Eric Bénier-Bürckel (Un peu d'abîme sur vos lèvres.)..
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