Le Boudy Band’Saï Saï, un atelier théâtre et une rencontre humaine au-delà de la différence.L’introduction de Charles Gardou et Emmanuelle Saucourt dans leur livre « La création à fleur de peau », semble résonner particulièrement en lien avec notre compagnie de théâtre inhabituelle :« L’art est irréductible aux théories, aux concepts, à la raison raisonnante et autres constructions de la seule pensée. C’est avant tout un concentré de chair : les êtres humains se montrent plus attentifs, plus perméables, si on les approche à travers l’expression artistique, comme lorsqu’ils contemplent des lignes gracieuses, de belles formes ou qu’ils écoutent des rythmes harmonieux, des mélodies suaves. Cela se vérifie tout particulièrement dans le domaine du handicap. Il n’en reste pas moins une difficulté à admettre que les personnes dites « handicapées » soient à même de participer pleinement à la création artistique. Que leurs pratiques ne se réduisent pas à des activités d’ordre thérapeutique ou occupationnel. Que, pour elles, comme pour tout artiste, l’art ait pour fin dernière le plaisir, la jouissance esthétique, l’extension de l’univers des possibles. Qu’elles puissent même susciter une sorte de révolution de l’art, en le replongeant dans la réalité contorsionnée du quotidien, où les expressions, les symboles, les équilibres n’obéissent pas aux critères usuels. Qu’elles oeuvrent, selon leurs talents, au sein de notre monde pour qu’il devienne ,,uvre. »Chaque nouveau projet théâtre est ainsi la création d’une ,,uvre, une ,,uvre d’autant plus intéressante qu’elle est totalement créative, que tous les acteurs ont une part, aussi minime soit elle, à offrir au groupe d’artistes. Cette reconnaissance artistique est venue au fil des histoires et de ce que nos spectateurs de tous âges nous renvoyaient. Quelque chose autour de la définition de l’acteur en tant que tel, en tant que celui qui offre au regard du beau, de l’émotion, du jeu, comme un cadeau que celui qui est spectateur reçoit s’il est disponible à cela, et en dehors de toute considération de voyeurisme. C’est une expérience humaine décloisonnante qui amène des éducateurs porteurs d’un projet à s’accepter « fragiles » et « simplement acteur accompagnant », non pas seulement dans une notion éducative, mais aussi dans une notion humaine forte et enrichissante sur l’autre et sur soi même. Le fait de prendre « le risque » de monter sur scène, « d’enfiler » un rôle particulier mais aussi d’accompagner dans une juste mesure un acteur porteur de handicap, est en soi une obligation d’entrer en communication avec l’altérité et de créer ensemble. C’est une réelle aventure extra-ordinaire qui a un rebondissement particulièrement intéressant pour les résidents acteurs qui en ont fait partie : une humanité mise à jour, qui de part ce regard posé sur eux d’une manière distanciée et positive, va permettre de les mettre dans une position adulte et respectable humainement. Cela se retrouve dans la vie de tous les jours, cela nous est apparut aussi particulièrement lors d’échanges avec de jeunes enfants d’écoles primaires qui avaient invités la troupe après le dernier spectacle. La crainte première devant la personne porteuse de handicap change, peut se parler parce qu’il n’y a pas que de l’impossible (impossible de marcher, de parler, de comprendre...) mais du possible parce qu’il y a eu partage d’émotion ou de rire, et que s’ils sont capables de faire rire ou pleurer, ils sont capables de penser. La pensée possible de la personne handicapée lui donne une humanité que les enfants sont les premiers à percevoir avec la simplicité qu’ils partagent. Ces spectacles ne sont pas des activités comme les autres, même si les répétitions s’inscrivent dans les cycles d’activités des établissements. Ils sont d’abord et avant tout un temps de partage créatif où les éducateurs ont une démarche éducative ouverte sur la création en restant sans cesse vigilants à la fragilité de la personne. Lorsque l’éducateur participe aux jeux de scène, il n’est pas seulement acteur en devenir, il est avant tout celui qui va peut être permettre à la personne en situation de handicap de se sentir assez en sécurité, assez accompagnée pour « oser » . Pendant les spectacles, même si l’éducateur est sur scène il est avant tout là pour mettre en valeur l’autre, suivant le rôle qui est le sien, et cela fait toujours partie du scénario avec un sens précis qui est le bon déroulement de l’histoire. Il doit être doublement attentif en étant à la fois dans son propre rôle mais aussi toujours prêt à intervenir pour aider à ce que les acteurs se sentent entourés et accompagnés, ne serait ce que d’un regard qui donne confiance.En mai 1998, «en vagues de fée, eau fin fond », le tout premier spectacle de la MAS JOLANE a apporté tellement de bénéfices à nos acteurs que la suite s’est enchaînée d’elle-même, avec une ouverture sur un travail inter-établissement riche d’échanges. « ISIDORE », « L’ARBRE A CHATS », et « QUI A VOLE ? ont suivis et à présent c’est pour « La famille Pyjacoeur », que le c,,ur de nos acteurs s’enthousiasme et travaille avec tellement de plaisir. Il sera lui aussi dans cette veine poétique, drôle et inattendue des créations du Boudy Band’Saï Saï ».Les premières représentations auront lieu au Péage du Roussillon, les jeudi 29 et vendredi 30 mars 2007, et à l’Espace Jean Poperen de MEYZIEU les jeudi 10 et vendredi 11 mai 2007. Pour ces deux semaines de représentations les spectacles du jeudi seront à 14h30, avec nous l’espérons des enfants des écoles et des centres spécialisés de la région, et ceux des vendredis seront à 20h, ouverts à tout public, et le plus largement possible. Onze résidents des trois centres : MAS JOLANE et CVI L’Orée des Balmes (ADAPEI), et IME LA BATIE de Vienne (AFIPAEIM), font partie de la troupe, accompagnés de leurs éducateurs, pour un total de 23 acteurs sur scène. La Compagnie Premier Acte, grâce à une subvention de la DRAC, nous accompagne déjà depuis plusieurs années, au fil des répétitions, par l’intermédiaire de Clémentine JOLIVET, et cet apport professionnel nous est particulièrement positif. Un film retraçant quelques répétitions en amont du spectacle devrait être réalisé par un cinéaste professionnel, permettant un regard sur le travail réalisé au fil des mois, sans parler bien sur du film du spectacle lui-même.